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Elle décrit dans un ouvrage son AVC : « J'étais morte avec les yeux ouverts »

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Sa vie a basculé en une fraction de seconde. C'était le 29 avril 1998. À quarante-trois ans, Élisabeth Montamat, qui a grandi à La Groutte et qui est revenue y vivre en 2003, s'en allait, en voiture, voir un bateau près de Caen. Soudain, elle n'a plus compris ce que son époux lui disait. Un accident vasculaire cérébral venait de la frapper. Seize ans plus tard, elle a consigné ses souvenirs dans un petit livre. Et raconte au Berry républicain la lutte pour retrouver son autonomie.

n Quel souvenir avez-vous de ce 29 avril 1998 ? C'était le matin vers 8 h 30. À l'époque mon mari était dentiste à Cherbourg (Manche) et nous habitions Caen (Calvados). Nous allions, en voiture, voir un bateau. Je sentais que quelque chose n'était plus comme avant. Mon mari me parlait mais je ne lui répondais pas, je ne pouvais émettre aucun son et je me suis mise à vomir. Mon mari m'a tout de suite emmenée au CHU de Caen. Je me souviens bien de mon arrivée : les soignants m'ont demandé de descendre de la voiture et je suis tombée dans les pommes. Je me suis réveillé six semaines plus tard.

n Au réveil, vous avez compris ce qui s'était passé ? J'avais l'impression d'avoir dormi pendant six semaines. Je ne me souvenais de rien. Quand je me suis réveillée, j'étais dans un lit avec une barrière. J'ai compris que j'étais malade mais je ne savais pas que c'était un AVC, je l'ai su bien après. Peut-être que les médecins me l'ont dit mais je ne m'en souviens pas.

n Quelles séquelles aviez-vous ? J'étais paralysée du côté droit, une hémiplégie. Je ne marchais pas, je me déplaçais en fauteuil roulant et je souffrais d'aphasie.

n Quels sentiments avez-vous éprouvés quand vous avez découvert votre état ? Un grand sentiment d'abattement. J'étais complètement morte mais avec les yeux ouverts. Je me demandais ce que j'avais eu et je ne comprenais pas parce que rien ne pouvait l'expliquer : je ne buvais pas, ne me droguais pas, je faisais du sport…

n Comment s'est fait le retour chez vous ? Après l'hôpital de soin, je suis allée en hôpital de réadaptation. Et je suis rentrée chez moi le 1 er novembre 1998, j'étais toujours en fauteuil mais je devais m'occuper de la maison et de mes trois enfants qui, à l'époque, avaient 15, 16 et 19 ans. Je n'avais pas le choix, il fallait que j'avance.

n Combien de temps avez-vous mis à remarcher ? À peu près un an après être rentrée. C'est long…

n Désormais, vous marchez sans cane, vous conduisez. Est-ce qu'il y a des gestes de la vie quotidienne que vous ne pouvez plus faire ? Je ne peux plus courir et danser. Le reste, je peux tout faire. Ce qui me manque le plus, c'est le piano. Je jouais depuis que j'ai quatre ans, je jouais tous les jours. Maintenant, je joue cinq minutes et j'ai le bras qui tombe. Je n'ai plus la disponibilité des doigts. Mais peut-être que le plus dur fut la perte de la mémoire. Je ne me souvenais pas du prénom de mes enfants, je n'avais plus d'images d'eux petits… ou il faut que je réfléchisse très longtemps. Heureusement, il me reste des photographies. Je ne reconnais pas non plus les gens. À La Groutte, je croise des gens que je ne reconnais pas. C'est une conséquence de l'AVC mais surtout qu'ils viennent me voir, qu'ils se présentent.

n Comment la famille a réagi ? Ce fut dur. Aujourd'hui encore, l'un de mes fils n'en parle jamais, l'autre a été très touché par cet épisode et ma fille s'est focalisée sur les études.

n Avez-vous toujours des soins ? Je suis une séance de kiné par semaine et j'ai des médicaments à prendre tous les jours, pour toute la vie.

n Avez-vous douté de la vie ? Je me suis en effet demandé pourquoi je vivais. Mais je suis croyante et je me dis que si je vis, c'est qu'il y a une raison. J'ai toujours eu envie de comprendre ce qui m'est arrivé et la religion m'y aide.

n Comment est née l'idée de ce livre ? Il y a trois ans, j'ai eu envie d'écrire, de raconter mon AVC. Je l'ai écrit d'un seul doigt à l'ordinateur et je l'ai fait éditer par Édilivre. C'est un livre qui m'aide chaque jour, face aux autres j'ai toujours un réflexe de recul, un AVC apporte forcément une baisse de la confiance en soi.

« Je suis croyante. Je me dis que si je vis, c'est qu'il y a une raison »

n À qui s'adresse cet ouvrage ? Aux valides qui ne savent pas ce qu'est la maladie et aux familles de malades.

n Aux malades, quel message donneriez-vous ? Que la vie continue, qu'il ne faut pas baisser les bras, accepter ce qui nous arrive, accepter d'être à demi. Moi, je suis à demi même si les gens me disent que j'ai eu de la chance. Pour moi, le plus difficile fut d'accepter de se situer toujours en dessous des autres. Mais je suis obligée de l'accepter, c'est comme cela. Quand je me lève, je dois faire attention à ce que mon pied gauche soit bien situé, que mes mains le soient bien sur le plateau sinon il tombe…

n Quel avenir envisagez-vous ? J'ai très envie de recommencer une vie, j'ai plein de projets mais il faut des financements.

n Quelle leçon tirez-vous de cet AVC ? Je crois que finalement je vis mieux à soixante ans qu'à quarante-trois quand cela m'est arrivé. J'étais croyante et cet AVC a renforcé ma foi. On n'a qu'une vie et je suis persuadée que j'ai encore beaucoup à faire.

è Pratique. Vivre à demi, aux éditions Édilivre. Le livre est disponible sur internet sur le site edilivre.com. L'auteur dédicacera son ouvrage le samedi 19 avril, à partir de 14 heures, au restaurant Le Noirlac.


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