Ils n'ont pas de bâton de parole. Mais ils ont Wouf, le chien en peluche, mascotte de la classe. C'est en se le passant que les élèves de CM2 de la classe de Geoffrey Tourny, à l'école du Vernet, se passent, chaque mercredi, la parole pendant le cours de philosophie.
Dans le Boischaut, quatorze classes ont choisi de suivre cet enseignement. À Saint-Amand, la classe du Vernet est la seule. « Quand le conseiller pédagogique de l'Éducation nationale, Christophe Dupuis, m'a proposé ce cours, je n'étais pas forcément emballé, explique Geoffrey Tourny. Et puis, il m'a montré une vidéo du cours suivi par les élèves de La Perche, qui font de la philo depuis deux ou trois ans. Ce qu'ils disent est incroyable. J'ai donc décidé de faire un essai de deux ou trois cours, à la rentrée de septembre. »
Les débats se poursuivent à table le soirHuit mois plus tard, les cours ont trouvé leur place dans l'emploi du temps : ils ont lieu le mercredi matin. Avec un rituel. Les enfants quittent leur salle de cours, s'installent au sol dans la salle d'activités de l'école et un chef des débats est désigné.
Cette semaine, les élèves âgés de dix ans ont planché sur un thème imposé par l'enseignant : existe-t-il une différence entre les garçons et les filles ? Vaste question qui a inspiré certains élèves, d'autres moins.
« La différence, c'est la voix », a d'abord lancé Axel, suivi par Hicham : « Ils n'ont pas la même pilosité faciale. » Afin de relancer le débat, l'enseignant prend la parole : « Vous n'avez trouvé que des différences. Les garçons et les filles n'ont pas de points communs ? » Les élèves lèvent le bras à tour de rôle et ne parlent que quand Wouf est dans leurs mains. « On est tous pareils car on a du sang », lance un élève, « on a tous des membres, on est tous humains », en rajoute un autre. Puis le débat s'est orienté vers les sentiments. « Les garçons ne pleurent jamais », assure l'un d'eux tandis qu'une fille est certaine : « Les filles sont plus fortes que les garçons, elles n'ont pas peur de leur taper dessus. »
Mais c'est la question de l'égalité des droits et devoirs chez les deux sexes qui a titillé les élèves : « On est tous égaux devant les droits et les devoirs, on n'a pas le droit de griller les feux », lance, terre à terre, Baptiste.
Si les élèves réutilisent parfois les notions en classe, ils poursuivent aussi parfois le débat à la maison. « Parfois mes parents me donnent des idées, me demandent si on a abordé tel thème », confie Amélia. « J'ai l'habitude de voir des débats dans d'autres classes, explique le conseiller pédagogique, le vôtre est très instructif. Le fait que vous en parliez en dehors est intéressant, cela veut dire que vous réfléchissez encore après. Je trouve que pour une première année de cours de philo, le résultat est déjà très bon. »
En juin, pour les derniers cours, les enfants devraient choisir le thème du débat. Sur quoi vont-ils philosopher ?