« Le pont-canal s'abîme chaque jour »
Deux panneaux de cédez-le-passage. Depuis le 14 mai, posés au début du pont-canal de la Tranchasse (1) qui enjambe le Cher et faisait passer les bateaux naviguant sur le canal de Berry de Colombiers vers Ainay-le-Vieil, ils interdisent le passage.
La faute à des croisillons manquants sur la rambarde. « Un acte de malveillance », pour le maire de Colombiers, Daniel Bône, qui a pris l'arrêté municipal d'interdiction. « Un signe supplémentaire du mauvais état » du pont-canal pour l'Association pour la réouverture du canal de Berry (Arecabe) : « On ne sait pas ce qui s'est passé, estime le président André Barre. On ne voit rien dans l'eau mais le manque de moyens accordés à ce pont a facilité le démontage. La main courante s'appuie sur des pierres en très mauvais état. On ne peut donc pas savoir si la disparition des croisillons est due à une dégradation volontaire ou si elle est le résultat du mauvais état du pont. »
Toujours est-il que le pont-canal est en effet en très mauvaise santé.
« Ce n'est pas la priorité »Quelques minutes d'observations, et le diagnostic tombe, sans intervention d'un expert : des pierres des piles sont tombées dans l'eau, le chemin de halage est très endommagé, les pieux en bois sortent de l'eau alors qu'ils ne devraient pas
Le pont qui appartient aux communes d'Ainay et Colombiers nécessite d'importants travaux. Mais c'est leur financement qui pose problème. Pour les maires des deux communes, de tels travaux ne sont pas une priorité : « On nous dit que nous sommes en partie propriétaire du pont mais ce pont est classé donc je n'y touche pas. Nous allons saisir le Syndicat mixte interdépartemental du canal de Berry (SMICB) (2) et j'ai prévenu la sous-préfecture. Si on veut refaire toute la rambarde, la facture s'élève à 100.000 euros. Ce n'est pas à nous de payer. » Daniel Bône questionne : « À notre époque, est-ce que l'urgence est ce pont ou de travailler pour réaliser des zones industrielles ou des équipements qui serviront vraiment aux habitants ? Je pense qu'il faut se poser la question. Mais en tout cas, la commune n'a pas les finances pour s'occuper d'un tel ouvrage. »
Marie Sartin, sa collègue d'Ainay-le-Vieil, tient un discours proche : « Nous n'avons pas d'argent à la commune. On ne peut rien faire. Pour une commune comme la nôtre, ce pont est un poids. J'y suis encore allée dimanche, j'ai discuté avec un pêcheur et on a regardé le sol dégradé, le plomb dans la cuvette a été volé. Ce pont se dégrade très vite mais on ne peut même pas y faire de menues réparations car il est classé »
Le premier pont-canal construit en régionPour l'Arecabe, un « minimum » de travaux permettrait, en urgence, de sauver le pont-canal. « Ce pont-canal est le premier construit en Région Centre, rappelle André Barre. La priorité est de réparer le chemin de halage. C'est par là que l'eau s'infiltre occasionnant du gel qui fait éclater les pierres. Il faudrait y couler du béton désactivé afin de l'étanchéifier. Ces travaux ont été estimés à 150.000 euros voilà trois ans. Mais personne ne veut payer. Ni les communes, ni le conseil général. Nous sommes conscients des difficultés financières des collectivités, assure-t-il. Mais rien ne bouge et le pont s'abîme. Si rien n'est fait, il va finir par s'écrouler »
(1) Le pont-canal a été érigé entre 1829 et 1834. Il a été utilisé jusqu'en 1955 et est classé aux monuments historiques depuis le 15 avril 2009.
(2) Contacté, le syndicat n'a pas pu être joint.