Un mécanicien dans les airs
Quand l'Europe s'embrase, à l'été 1914, Clément Godard a vingt-six ans. Ce jeune Berrichon né le 16 décembre 1887 à Gehée, près d'Écueillé, dans l'Indre, ayant aussi vécu à Vierzon, est mécanicien de formation. Comme tant d'autres, il est mobilisé. Il est affecté au 90 e Régiment d'Infanterie, qu'il rejoint le 14 août 1914, dans la Meuse.
« Il fait partie de ces personnes qui ont eu un destin particulier durant ces années de guerre », souligne l'historien Charles Bohnert. Les recherches de ce dernier ont permis de retracer le parcours de plusieurs soldats Vierzonnais, dont celui de Clément Godard, grâce aux documents d'époque. Notamment à l'aide d'une source exceptionnelle, un carnet tenu par le jeune homme lui-même tout au long du conflit. On sait ainsi qu'il fut mécanicien dans plusieurs escadrilles. Une véritable « épopée oubliée » de l'aviation, selon l'historien, vue non pas du côté des as, mais d'un simple technicien.
Dès les premiers mois de la guerre, encore dans l'infanterie, Clément Godard connaît l'enfer des champs de bataille du Nord du pays. Son régiment participe aux combats qui enflamment la frontière de la Belgique et, en octobre, prend part à la bataille de l'Yser. Lors de cette course effrénée le long du fleuve belge, que l'armée allemande tente de franchir, il est blessé le 5 novembre 1914.
Sans gravité, cette blessure marque, pourtant, un tournant pour le jeune soldat. Il change d'affectation et, après sa convalescence, reprend son métier de mécanicien. Il entre dans l'arme encore balbutiante, mais en plein essor, qu'est l'aviation.
Dès le 4 avril 1915, Godard intègre l'escadrille 4, basée sur l'aéroport de Lyon-Bron (Rhône), avant de rejoindre l'escadrille MF 50 à Somme-Tourbe, dans la Marne, où il est affecté comme mécanicien du pilote Marcel Burgun.
L'escadrille est toute récente. Ce sont les temps héroïques de l'aéroplane. Ses avions effectuent avant tout des missions de reconnaissance. « Créée le 11 février 1915, elle est mise à la disposition de l'armée de Chalons, relate Charles Bohnert. Dotée de six avions Voisin, elle est abritée dans des hangars civils de Bouy (Marne) pendant un mois, avant de prendre place à Somme-Tourbe. »
En panne à 4.000 mLe 4 novembre 1916, Clément Godard suit son pilote. Il est affecté à l'escadrille N 49, à Fontaine (Territoire de Belfort). À chaque mission, pour les deux hommes, le risque est grand. Au cours de l'une d'elles, alors qu'ils volent à 4.000 m d'altitude, le moteur de leur appareil tombe en panne. Ils doivent descendre en planant, puis atterrir, ce qui ne se fit pas sans dégâts « Certaines de leurs missions se terminent près des lignes allemandes, raconte Charles Bohnert. L'avion étant endommagé, il faut le réparer sur place, ce qui demande la protection des troupes au sol. Bien souvent, aussi, il faut effectuer des déplacements pour récupérer les pièces. »
Clément Godard poursuit la guerre au gré des affectations, à la SPA 38, entre autres, en 1917. Il est le mécanicien de plusieurs pilotes, dont un certain Tournemine, connu pour avoir percuté un avion allemand afin de l'empêcher de bombarder un poste français. Vient l'Armistice de 1918. S'il quitte l'armée, le Berrichon ne délaisse pas sa profession et retourne à la vie civile comme mécanicien.
è Appel. Les témoignages de Vierzonnais dont un aïeul a participé à la Première Guerre mondiale sont les bienvenus.