Le solaire chinois mauvais pour le vin ?
Quel est le point commun entre un panneau solaire chinois et une bouteille de vin de Sancerre ? A priori aucun. Pourtant les deux servent de moyen de pression dans une bataille économique entre l'Union européenne et la Chine.
L'exportation des vins du Centre- Loire en Chine représente 0,2 % des exportationsPour protéger les industries innovantes et notamment les énergies propres, l'instauration d'une taxe sur les panneaux solaires chinois a été décidée au niveau européen. Cette taxe, antidumping, a pour but de compenser les aides reçues par les entreprises chinoises de la part de l'État. En effet, avec ces aides financières, les entreprises peuvent pratiquer des tarifs bien moins chers que les sociétés européennes, ce qui nuit fortement au marché. En guise de représailles, la Chine menace d'appliquer la même taxe antidumping sur les vins européens. Car il existe aussi des aides au niveau de l'agriculture et donc de la viticulture, en France mais aussi dans les autres pays de l'Union européenne.
« Pour l'instant ce ne sont que des échanges verbaux, tempère Benoît Roumet, directeur du Bureau interprofessionnel des vins du Centre (BIVC). Il est toujours possible de trouver un accord. » Pour les vins du Centre-Loire et plus spécifiquement le sancerre, les risques sont assez minimes. « L'exportation des vins du Centre-Loire en Chine représente 0,2 % des exportations, soit 32.000 bouteilles par an », continue Benoît Roumet. De quoi rassurer les producteurs. Même si 72 % de ces 32.000 bouteilles – soit 23.500 – sont du sancerre, « puisque c'est le plus grand domaine du Centre Loire ».
« Les panneaux solaires et le vin n'ont rien à voir, poursuit le directeur du BIVC. C'est du commerce. Les exportations rapportent aux producteurs français mais aussi aux importateurs chinois, comme les restaurateurs. Si les exportations étaient bloquées, ça ne serait pas tenable. Ça ne m'inquiète pas, une solution va être trouvée. »
Au domaine Fournier père et fils, basé à Verdigny, Guillaume Pinson, responsable export, ne dramatise pas non plus la situation malgré un contrat d'un million d'euros signé avec la Chine en 2010 et qui a été reconduit. « On ne sait pas trop pour le moment. Cela représenterait une perte, mais dans le Sancerrois, on a toujours su ne pas mettre nos 'ufs dans le même panier. On sera moins impactés que le bordeaux par exemple. Nos principaux clients restent les États-Unis et la Grande Bretagne. Même si notre contrat avec la Chine est important, la menace de ce pays ne mettrait pas le domaine en faillite. Ce serait surtout embêtant pour le développement commercial. »
Mauvais pour l'imageEn effet, si l'enquête antidumping demandée par la Chine a peu de chance d'aboutir à une taxe sur les vins européens, cette discorde n'est pas bonne pour l'image. Ça ne fait que cinq ans que les vins du Centre Loire s'exportent en Chine, les producteurs aimeraient que ça dure.
« C'est un marché en devenir. Quand un pays commence à produire son propre vin, les habitants commencent à consommer et s'ouvrir à la culture du vin. C'est le cas, par exemple de l'Australie. Il y a quinze ans on ne vendait pas de vin aux Australiens. En 2012, 130.000 bouteilles ont été exportées. »
En attendant les décisions qui seront prises au niveau de l'Union européenne, et leur conséquence sur les producteurs, Benoît Roumet compte se rendre en Chine, durant l'été, « pour prendre la température ».