« Je suis totalement innocent de cet assassinat ». D’une voix ferme et posée, Romain Papon répète, ce lundi matin, à la cour d’assises du Loiret, ce qu’il a maintes fois répété devant le juge d’instruction, depuis sa mise en examen en juin 2015.
Au premier jour du procès des quatre hommes mis en cause dans le meurtre de Nordine Bouarroudj, le principal accusé persiste à nier les faits dont on l’accable.
Les mots sont choisis et c’est avec une certaine aisance que s’exprime ce Berruyer de 34 ans, originaire de Nevers, qui se rêvait enfant, en avocat ou en journaliste.
« Calme, franc, honnête dans ses relations, diplomate »Romain Papon, dont la cour s’applique à cerner la personnalité, se présente volontiers comme un garçon « calme, franc, honnête dans ses relations, diplomate », capable de désamorcer les conflits. Un portrait qui le propulse à mille lieues de l’acte criminel qu’on lui impute : avant que son corps en décomposition ne soit découvert, le 20 juin 2014, dans un fossé d’Autry-le-Châtel, Nordine Bouarroudj avait été froidement abattu de trois balles.
Romain Papon connaissait la victime, avec laquelle il se livrait à un important trafic de stupéfiants sur la région de Nevers (Nièvre). Au demeurant, l’accusé revendique volontiers son implication dans l’importation et la revente de cannabis, qu’il qualifie tout naturellement de « business » ou de « travail », alors même qu’il se présente comme « un simple salarié ».
« On me présente comme le numéro un du trafic »Cette activité illicite, révélée à la faveur de son interpellation dans le cadre de cette affaire d’assassinat, lui a valu, depuis 2017, deux condamnations à trois et cinq ans de prison, dont la dernière a fait l’objet d’un appel.
Mais cela est-il suffisant pour faire peser sur Romain Papon la responsabilité d’un meurtre vraisemblablement commis dans le cadre d’un règlement de comptes sur fond de trafic de stupéfiants?? Non, s’empresse de répondre l’intéressé qui déclare se situer à « une ou deux marches en dessous du grand importateur ». Et laisse d’ores et déjà entendre que l’assassinat a été commis par un autre que lui.
« J’assurais la logistique »« On me présente souvent comme le numéro un du trafic. Mais j’étais sous les ordres d’autres personnes. J’assurais la logistique : je sécurisais le convoi, je distribuais les téléphones et je communiquais avec les fournisseurs » résume Romain Papon.
Des affirmations que l’un de ses coaccusés, poursuivi pour le délit de recel de cadavre, conteste à l’audience. « Je n’ai jamais vu personne au-dessus de Romain Papon et il ne m’a jamais parlé de personne. C’est toujours lui qui me donnait des instructions », assène ce garçon de 32 ans, dont le rôle, au sein du trafic, consistait à ouvrir les convois depuis l’Espagne, d'où la résine de cannabis était acheminée par dizaines de kilos.
Reste que Romain Papon est également mis en examen, à Bourges, pour un autre meurtre. Celui de son ami Abdelilah El Ouahiani, en avril 2013 à Nevers, abattu de huit balles. Des faits que l’accusé nie tout autant, tandis que son avocat, Éric Plouvier, s’érige contre l’évocation à l’audience de cette seconde affaire, qui porte atteinte, selon lui, « au droit à une procédure équitable ».
Le procès, qui doit durer cinq jours, reprend ce matin.
Philippe Renaud.